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UNE PLANTE PRÉCIEUSE POUR LES ABEILLES

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Dans une étude menée par l’université de Leeds UK et publiée en 2013 dans la revue Sciences, il est montré qu’en Angleterre et aux Pays Bas une corrélation existe entre la diminution des insectes pollinisateurs et la diminution des végétaux à pollinisation entomophile. Plus généralement la production de miel en France peut être corrélée à la diminution des surfaces de végétaux à intérêt apicole. Or les surfaces de luzerne cultivée aussi bien pour la déshydratation que pour l’autoconsommation sont passées de 1 million d’hectares dans les années 1970 à 300 000 hectares aujourd’hui ! Les productions de miel subissent toujours les contraintes climatiques et de ce fait les courbes de production ne sont jamais linéaires.

C’est encore plus vrai pour la miellée de luzerne pour laquelle la présence de fleurs n’est jamais certaine et les conditions de la nectarification ne sont pas toujours obtenues en raison notamment de la gestion des coupes. Si l’on s’affranchit des variations de production liées à des facteurs climatiques, on voit que la production de miel de Champagne est relativement constante, mais que les productions du Sud, de l’Est et de l’Ouest sont, elles, en déclin. Ce déclin est clairement lié aux diminutions de ressources intermédiaires entre les périodes de grandes miellées type colza/ tournesol. En Provence par exemple la disparition du sainfoin et de la luzerne a été un facteur important dans la diminution de la production de miel sur lavande. Dans ces deux derniers cas, en effet, la luzerne constituait un affouragement fondamental pour développer les ruches avant la miellée et la rendre apte à produire en abondance sur lavandes ou tournesol.

De la même manière la végétation pérenne de la luzerne permet la reconstitution des populations d’abeilles avant l’hiver. La récolte de miel a connu un point bas en France en 2014 avec seulement 10 000 t à rapprocher des 15 000 tonnes produites encore en 2009 et des 35 000 tonnes dans les années 80 ! Parallèlement à cela la consommation de sirop (en remplacement du miel) est montée à peu près à l’équivalent de la production française de miel. Ceci signifie qu’aujourd’hui les apiculteurs maintiennent artificiellement le cheptel apiaire dans l’environnement en compensant la diminution des ressources en plantes mellifères par du sirop !

D’autres réductions des ressources apicoles viennent aggraver la situation comme les modes de gestion des lisières forestières et des bords de routes. Les changements climatiques font que les espèces végétales non sélectionnées à des fins de productions agricoles répondront moins favorablement aux stress, hydriques en particulier. Cette réduction massive et multi causale de la ressource est une des principales raisons du phénomène de dépérissement des populations d’abeilles en zone occidentale, et particulièrement en zone de grandes cultures industrielles.

Aujourd’hui, la tendance lourde est à la réduction du nombre des pollinisateurs et la perte de biodiversité végétale comme le confirme l’étude de Carvalheiro. Beaucoup de plantes ont développé au cours de la co-évolution des espèces à travers le temps des rapports de complicités-dépendances plantes-insectes en matière de fécondation végétale. Les abeilles constituent les insectes pollinisateurs les plus performants. Elles agissent à la fois sur les espèces végétales sauvages et cultivées. Dans l’économie de la nature, cette fonction n’est pas rémunérée.

Seule une petite partie de la pollinisation (des arbres fruitiers ou des plantes portes-graines) supporte la charge de ce service indispensable. La plus grosse part du service de la pollinisation des plantes est en fait, supportée par l’économie de la vente du miel et des autres produits apicoles. Autrement dit, tant que le miel sera produit et pourra se vendre assez bien pour rémunérer l’apiculteur, le service gracieux à l’environnement continuera à se maintenir. Tant qu’il y aura des fleurs à butiner et des abeilles en pleine santé ce service gracieux à la collectivité se maintiendra.

Or ce service gracieux est aujourd’hui menacé notamment en raison de la réduction des ressources florales. Les mécanismes en jeu ressemblent à de fragiles châteaux de cartes où de petites variations peuvent avoir de grands effets. Toute dégradation supplémentaire de la niche écologique qu’occupent les abeilles peut produire l’effondrement du système biologique global.
Dans des suivis estivaux on a observé de manière fréquente des collectes de pollen et nectars à plus de 5 km. Ceci signifie qu’un espace favorable aux abeilles domestiques couvre une zone de 80 km². La réduction des surfaces productives pour les abeilles conduit ainsi à une réflexion sur la notion de zone refuge. Si l’on considère que les abeilles occupent une zone refuge sa dégradation peut alors devenir extrêmement délétère à l’espèce.

Les abeilles constituent la clef de voûte d’un système complexe qui interfère grandement avec l’économie agricole. Ainsi, la Politique Agricole Commune a t-elle autant d’effet que la politique environnementale sur l’indispensable maintien de la biodiversité dans l’espace européen.

Là où les luzernes sont cultivées et avec des modifications marginales des modes de récolte (comme la gestion différenciée des surfaces, voir pages 30-31) sur l’ensemble de la zone de collecte d’une usine ou d’un agriculteur, on est capable de mettre en place une trame verte sous forme de peau de panthère où les tâches se rapprocheraient dans l’espace et le temps pour constituer une quasi continuité. Avec un coût modique pour un avantage écologique considérable.

Années 8035 000
201015 000
201116 000
201218 500
201314 000
201410 000
201516 000
20169 000
201710 000